Constance Baudry, du monde.fr, revient sur les réactions de blogueurs à la diffusion de la vidéo de Ségolène Royal. Peu étonnant : elle ne relaie pas le billet critique à l'égard de son article que j'ai publié hier (et s'abstient donc de noter la responsabilité du Monde dans la diffusion de cette vidéo, préférant l'hypothèse confortable de l'émergence propre à "la blogosphère"), et renvoie vers ceux qui s'interrogent sur cette révolution, épisode Allen en perspective, ou ceux qui ont choisi de ne pas relayer.
Cela mérite un tout petit peu de commentaire.
Revenons d'abord sur l'épisode George Allen et la campagne américaine : quelques blogueurs français s'enflamment pour "l'élection youtube", attendant en France "l'élection dailymotion". Il me semble que quelques corrections sont nécessaires pour tempérer cet enthousiasme.
D'abord : la vidéo "macaca" n'a pas fait chuter George Allen. L'évolution des courbes de popularité de George Allen et Jim Webb n'a, semble-t-il, pas connu de mouvement majeur avec la diffusion de la vidéo (mais une remontée progressive s'est juste confirmée), et il parait présomptueux de dire que cette vidéo a "fait chuter" le républicain aux accents racistes, ou que sa carrière "s'est brisée en plein élan". Comme le dit Frank Rich du NYT, c'est surtout un moment symbolique, qui montre que les vieux réacs ne passent plus, pas forcément un moment décisif qui fait le résultat du vote. L'élection de Virginie a été alimentée par de nombreux autres thèmes, qui, rappelons-le, s'est terminée de manière ultra serrée (7000 voix d'écart sur plus de 2,3 millions de votes), après une remontée lente et progressive du challenger démocrate. Ce n'est pas une révolution, mais une foule de facteurs qui explique le changement. Youtube n'y es tqu'un symbole, une histoire, et un petit influenceur.
Aux Etats-Unis, si Youtube a joué un tel rôle pendant la campagne américaine, c'est avant tout parce que la politique a l'habitude de l'utilisation de la publicité télévisée lors des campagnes. Youtube a simplement servi de canal supplémentaire de diffusion complémentaire à ces publicitésà travers le réseau des internautes militants. Très peu des vidéos de la campagne étaient effectivement produites par des internautes ou des contenus originaux, l'immense majorité des contenus étaient de simples spots télévisés.
Ne croyons pas faussement à la révolution des blogueurs qui vont mettre fin au off, et soulever les lièvres oubliés par les honteux media soumis aux contraintes des puissants. "La blogosphère est un espace où, parfois, peut émerger une information négligée par les journalistes, mais c'est aussi le royaume du spin et de la manipulation, particulièrement aux Etats-Unis. Netpolitique est très juste sur ce point. En France, il va nous falloir, blogueurs, simples internautes, journalistes, apprendre à manier ce matériau nouveau avec le sang-froid et le recul nécessaire. Cela ne sera pas sans erreurs : elles sont logiques dans un espace qui se recompose, il n'est pas inutile de les reconnaître.
Comme je le disais déjà : cet apprentissage de ce qui est ou pas une information à répercuter vaut principalement pour les media professionnels et à forte audience ou influence : on ne pourra jamais empêcher que quelques blogueurs s'emparent de contenus polémiques ou manipulateurs, diffusent des vidéos. Croire que tous adhéreront à une charte éthique bancale relève du voeu pieux, et d'une pression morale qui ne convient pas à la réalité de cet espace. En revanche, le journaliste professionnel qui s'intéresse à cet univers et ses activités doit y apporter du recul et du professionalisme : de l'enquête, de la sélection pertinente, de la hiérarchisation, voilà ce qui peut justifier le travail d'un oeil journalistique sur "les blogs".
En 2007, l'élection dailymotion sera donc différente de l'élection Youtube. La première raison en est que les règles sont extrèmement différentes : les partis trouvent sur internet un espace formidable de liberté, quand le reste de leur communication est complètement bridé. Il est fort probable qu'ils profiteront du coté non-contraignant de la législation et de la faiblesse des moyens des équipes de contrôle pour alimenter à coeur de joie, sous le manteau, des polémiques et du negative campaigning. Les extraits de réunions, les petites phrases, les bouts de discussions de plateaux télé, vont être diffusés à foison. Les vidéos satiriques vont rajouter de l'huile sur le feu. Tout ça sera plus ou moins, mais jamais officiellement, en lien avec les partis politiques. Vous n'aurez pas l'équivalent américain, utile, du "je suis Ségolène Royal et j'approuve ce message" en bas de la vidéo "le vrai Sarkozy".
L'autre raison de cette différence, c'est l'inexpérience de la vidéo politique et de la satire, par rapport à nos amis anglo-saxons. Le web est un lieu formidable pour voir réapparaitre de la satire libre et de qualité, mais soyons honnêtes : rares sont les contenus satiriques qui valent le coup. 2007 sera sans doute néanmoins l'occasion de quelques révélations ou émergences de ces contenus alternatifs originaux. J'aime bien les tentatives de 20 minutes dans le domaine, d'ailleurs : de l'anticipation élcairante...
Calmos la révolucion, donc. Cessons de clamer partout quand elle n'est pas là où on la croit.
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A noter : fluctuat avait également répertorié les publicités google sur la vidéo star du week-end. Finalement, comme on ne saura pas qui a balancé cette fameuse publicité incitant à remettre de l'huile sur le feu, on peut accorder à google video et wat.tv (TF1) l'oscar du bon goût publicitaire : ils tentent de voler à dailymotion l'intérêt des internautes sur ce contenu indélicat. Je ne reviens pas sur mes suspicions un peu trop affirmatives, qui ont été comprises comme des accusations définitives.
Info ou manip ?
Le FDI (Forum des droits sur Internet) veut signaler les dérives de la campagne présidentielle sur le Net et s’apprête à mettre en place un « observatoire de la web campagne ». [...] « Nous veillerons tout particulièrement à signaler les hoax qui seraient de nature à diffamer telle ou telle personnalité politique », explique le juriste et chargé de mission au FDI.
Vu sur :
http://www.01net.com/editorial/332742/presidentielle-2007/les-coups-bas-de-la-video-politique-en-ligne/
Rédigé par : F. de C. | 14 novembre 2006 à 13:43
Rien à voir avec votre "post" ci (je suis hors sujet)...
Juste une suite de notre conversation de Jeudi dernier : Vous aviez raison !
http://arlyjames.over-blog.com/article-4539209.html
Ecrit à votre attention !
Bonne lecture.
JA
Rédigé par : James Arly | 14 novembre 2006 à 14:38
Mouais.
L’équipe de campagne décide de faire contre-feu, en se focalisant sur la méthode. Les médias moutonniers suivent et ne traitent l’info QUE sous cet angle. Et idem chez les bloggueurs, visiblement tout aussi moutonniers.
Mais merde, elle les a tenu ou non ces propos ? Et pas sous la contrainte, que je sache. Et ca vous choque pas, vous que celle qui prétend renouveler la politique, considère comme une trahison de divulguer des propos qu’elle a effectivement tenu ?
Au moins, cette affaire révèle une chose, c’est que les blogs, censés renouveler le débat démocratique, ne sont en fait que des candidats à l’examen de passage dans le « cercle de la raison » médiatico-politique. La fixette entretenue sur les chiffres de fréquentation et les reprises dans les médias traditionnels en atteste.
Amicalement
Rédigé par : nounours | 14 novembre 2006 à 15:30
nounours : va sur les blogs d'enseignants (recherche brighelli sous google, tiens), tu verras qu'on ne parle pas que sous cet angle, mais uniquement dans la blogosphère que tu fréquentes (celle des blogopros).
Rédigé par : versac | 14 novembre 2006 à 15:56
Il est clair que si les internautes parvenaient à se montrer plus responsables dans leurs pratiques et commentaires, c'est le médium lui-même qui serait enfin crédibilisé vis-à-vis des mass-média, et de façon décisive.
Rédigé par : laurent | 14 novembre 2006 à 17:39
Laurent,
Si vous rêvez de reconnaissance et de crédibilité, pourquoi ne pas intégrer professionnellement un organe des "mass-media" ?
Peut-être parce que c'est plus difficile que d'ouvrir son blog en trois clics…
Rédigé par : Martel | 14 novembre 2006 à 18:29
Quelqu'un a vu un gros troll bien con se balader et répondre sous le mauvais billet au mauvais Laurent ?
Faut pas se mettre martel en tête...
laurent : n'attendez pas de millions d'individus qu'ils se montrent responsables. Vous seriez déçu.
Rédigé par : versac | 14 novembre 2006 à 19:50
Versac,
Je répondais ici à ce Laurent-ci, je ne comprends pas bien le sens de vos éructations.
Néanmoins, j'en retiens le ton et le manque de fond. Lorsqu'on touche au non-dit du "phénomène-blog", on mesure la véritable nature de ceux qui les animent. Où sont donc passés l'amour de la démocratie, l'ouverture d'esprit, l'attachement au débat, la libre participation citoyenne, etc. ?
Tous ces gros mots que les bloggeurs s'autodécernent volontiers ne tiennent pas longtemps dès qu'ils rencontrent l'ombre du soupçon d'un semblant de critique. Hors de l'assentiment béat et de la congratulation commun(autair)e, point de salut ?
C'est bien, continuez comme ça. En fait de "renouvellement de la politique" (LOL, certains ne doutent de rien), c'est surtout un singulier retour en arrière que je vois par ici.
Rédigé par : Martel | 14 novembre 2006 à 23:23
Martel : quand vous aurez lu sur ce blog que je m'auto-décerne quoi que ce soit ou que je pense que les blogs révolutionnent la démocratie participative, ou tout autre chose de ce genre, on en reparlera. Comme ce n'est pas le cas, vous tombez à coté.
Toute personne qui dit "les bloggeurs", et qui leur attribue des comportements homogènes péjoratifs, et fait de moi un exemple de ce comportement honteux et de la bassesse de cette révolution, sur la foi de quelques lignes vaguement lues a le droit à ce type de traitement.
Désolé, changez de ton, vous êtes chez moi, allez troller ailleurs. Ou revenez, lisez, éhcnagez, et critiquez à bon escient.
Rédigé par : versac | 15 novembre 2006 à 00:07
Après ce moment de tension, un moment de détente:
http://www.youtube.com/watch?v=VUo9zV3pGY4
Si j'étais ségolène, je serais quoi en faire :)
Rédigé par : zadvocate | 16 novembre 2006 à 02:41
A l'auteur du fil : "Constance Baudry renvoie vers ceux qui s'interrogent sur cette révolution ou ceux qui ont choisi de ne pas la relayer...".
Vous ajoutez "épisode Allen en perspective".
Vous êtes sûr que ça ne fera pas plus "Allien" que "Allen" ?
Rédigé par : JASMIN | 16 novembre 2006 à 13:41