C'est donc fait. En première instance, le tribunal a donné raison à l'association "Croyance et libertés" et la conférence des Évèques de France, en demandant à la société Marithé + François Girbaud de cesser la diffusion de leur publicité (représentée ici, je prends avec joie cette liberté, ne me sentant contractuellement pas engagé par l'astreinte, merci à mes amis juristes de me dire ce que je risque).
J'avais tout de suite trouvé cette photo très belle, d'une grande pureté, et en outre intelligente. On pouvait y lire de vagues messages sociaux (et les femmes dans la religion ?), on pouvait y voir aussi un surf opportun sur l'actualité du Da Vinci Code, avec un détournement propre à la marque. Le traité élégant, sans vulgarité, sensuel, lui donnait un ton et une place très sympathique, la marque ayant trouvé une justesse, loin des clichés porno-chics du genre.
Ce n'est d'ailleurs pas très étonnant de la part de M+F Girbaud, que j'aime autant, sinon plus, pour leurs créations de vêtements que pour leur démarche alentour : l'appel à des designers de talent pour leurs boutiques (Kristian Gavoille pour leur boutique de la rue Etienne Marcel) pour en faire de vrais espaces d'expérimentation, ou des publicités qui ont toujours été d'une grande créativité graphique, sans provox gratuite, sans manipulation hasardeuse. Une marque qui a toujours eu une place dans la création, au-delà même de la simple "vente de vêtements".
C'était l'avis du parquet, qui a réclamé la relaxe, en notant ""La scène n'est ni pornographique ni grotesque, a estimé Mme Caby. La présence d'un homme nu vu de dos ne me semble pas obscène en 2005. L'interdiction serait une censure de principe.". C'était rassurant. Ce ne fut pourtant ni l'avis des évèques, ni du juge. Celà peut nous faire nous poser quelques questions.
D'abord sur l'homme. Les évèques se plaignent de cet érotisme troublant, leur avocat dit "il est dans une attitude lascive. Il est nu et il enlace une femme, sans souci de la tragédie qui se déroule autour de lui.". C'est une interprétation que je ne partage pas. Et ce ne serait bien évidemment pas la première fois qu'on pourrait trouver qu'un personnage de l'histoire religieuse est représenté avec un degré érotique. En l'occurrence, je le trouve plutôt touchant, cette Marie-Madeleine masculine, amoureuse qu Christ, qui vient se réfugier dans les bras de son voisin, ne pouvant subir le choc de la venue du drame.
Mais surtout sur la place de la pub comme expression. Le livre Da Vinci Code n'a pas été interdit, malgré des thsèes beaucoup plus dures que ce simple visuel. La Pub, elle, n'a pas eu ces faveurs. Et les campagnes publicitaires sont beaucoup plus la cible d'attaques de la part de l'Eglise catholique que les oeuvres littéraires. Ainsi en allait-il d'une pub pour Volkswagen ou de l'affiche du film Amen.
Parce que la pub n'est pas jugée comme une oeuvre de création, mais comme, déjà, un mal en soi. Dire que catho=nazi (la croix qui se transforme en croix gammée) est possible dans un film, mais pas dans la pub du film. Parodier la Cène - de manière douce - dans une pub est plus difficile que de dire que toute la religion chrétienne est fondée sur un mensonge, dans un livre.
C'est le problème de la pub, qui est sortie de son rôle de réclame pure, mais qui n'est pas acceptée en tant que telle, légalement, et sans doute par une partie de la société. Or, pour moi, la démarche d'une entreprise est globale, et je défie quiconque de placer un curseur cohérent entre des démarches de pure communication, et d'autres de pure culture.
J'espère donc que l'appel donnera raison à Girbaud. Et qu'il sera bien noté qu'en l'absence de réaction de la part des évèques de France, peu de monde aurait vu cette publicité, et donc n'aurait pu subir cet "acte d'intrusion agressive et gratuite dans le tréfonds des croyances intimes", comme l'a dit le juge. On se demande quel était l'objectif réel des évèques. Interdire une image génante, ou rappeler que l'Eglise a l'unique monopole du discours sur la religion ? Ou bien simplement, par réaction, par bètise, attaquer ce qui est attaquable ?
[Mise à jour. Ce post m'a trainé dans la tête tout le week-end, étonné que j'étais de la dureté du jugement et du montant de l'astreinte, alors que je ne voyais pas où était vraiment le problème. J'avais négligé de faire un tour des blogs sur le sujet, hier soir. Paxatagore revient dessus, avec un éclairage juridique utile, puisqu'on y apprend que le parquet ne peut pas plaider la relaxe devant un juge des référés. Lire aussi le billet de Guillaume Barry sur un swissroll, qui trouve le ton. Enfin, en réponse à Paxa : chacun son sujet. Le mien, c'est plus la pub que le droit. Merci à tous ceux qui m'ont signalé la piètre qualité de ce billet posté tard un dimanche soir.]
Sombre recopiage du Monde ! Le parquet n'a pu requérir la relaxe, car on n'était au pénal, comme je l'explique succinctement dans mon dernier post sur le sujet. Peut mieux faire, Versac !
Rédigé par : Paxatagore | 14 mars 2005 à 08:02
Fallait-il interdire la pub Girbaud ?
Certainement pas cette publicité là, mais toutes les publicités, oui.
Ce n'est pas le sujet du post, mais un monde sans pub serait tellement meilleur...
Rédigé par : Media | 14 mars 2005 à 10:20
Vous écrivez que "les campagnes publicitaires sont beaucoup plus la cible d'attaques de la part de l'Eglise catholique que les oeuvres littéraires". C'est exact et c'est normal. Même si une image publicitaire peut ne pas différer beaucoup d'une image artistique (je vous renvoie au livre de photographies sur le même thème et où Jésus apparaissait aussi sous les traits d'une femme, publié par Bettina Rheims (ortho ?), il y a une dizaine d'années, et qui n'avait pas été interdit), la fonction de ces deux types d'images est fondamentalement différente.
On peut admettre (voire souhaiter ?) qu'une image artistique puisse choquer, provoquer, remettre en question nos certitudes, nos croyances, nos systèmes de pensée. C'est probablement l'une des fonctions de l'art et toute l'histoire de la modernité s'est accompagnée de scandales qui ont permis d'élargir la compréhension de la société et ont contribué à faire sauter les verrous politiques, philosophiques, esthétiques, moraux, etc.
Mais une image publicitaire n'a pas d'autres buts — quoiqu'en disent les publicitaires eux-mêmes — que de faire grimper la courbe des ventes. Facile à vérifier : qu'un publicitaire fabrique un visuel (im)pertinent, critique, intéressant, etc. qui ne provoque pourtant pas une amélioration des ventes, et son client ne lui commandera pas sa prochaine campagne. À l'inverse, une publicité est considérée comme efficace si elle permet de vendre le produit, même si elle est artistiquement très pauvre (c'est l'exemple typique des pubs pour lessives).
Compte-tenu de ces objectifs profondéments divergents (voire opposés ?), cela ne me choque pas que la liberté de création soit respectée et même encouragée pour les artistes, alors que la liberté de blesser profondément une part du public dans le seul but de se remplir les poches sera strictement encadrée.
La culture et le business restent deux choses distinctes, quand bien même les publicitaires essaient de brouiller les frontières. S'ils essaient de se faire passer pour des artistes, c'est d'ailleurs stratégiquement intéressé (plus value dans l'imaginaire collectif, liberté plus grande, etc.). Ramenons ces "Fils de Pub" (titre d'un bouquin de Séguéla) sur terre.
Antoine Block.
Rédigé par : Antoine Block | 14 mars 2005 à 10:51
Vous écrivez que "les campagnes publicitaires sont beaucoup plus la cible d'attaques de la part de l'Eglise catholique que les oeuvres littéraires". C'est exact et c'est normal. Même si une image publicitaire peut ne pas différer beaucoup d'une image artistique (je vous renvoie au livre de photographies sur le même thème et où Jésus apparaissait aussi sous les traits d'une femme, publié par Bettina Rheims (ortho ?), il y a une dizaine d'années, et qui n'avait pas été interdit), la fonction de ces deux types d'images est fondamentalement différente.
On peut admettre (voire souhaiter ?) qu'une image artistique puisse choquer, provoquer, remettre en question nos certitudes, nos croyances, nos systèmes de pensée. C'est probablement l'une des fonctions de l'art et toute l'histoire de la modernité s'est accompagnée de scandales qui ont permis d'élargir la compréhension de la société et ont contribué à faire sauter les verrous politiques, philosophiques, esthétiques, moraux, etc.
Mais une image publicitaire n'a pas d'autres buts — quoiqu'en disent les publicitaires eux-mêmes — que de faire grimper la courbe des ventes. Facile à vérifier : qu'un publicitaire fabrique un visuel (im)pertinent, critique, intéressant, etc. qui ne provoque pourtant pas une amélioration des ventes, et son client ne lui commandera pas sa prochaine campagne. À l'inverse, une publicité est considérée comme efficace si elle permet de vendre le produit, même si elle est artistiquement très pauvre (c'est l'exemple typique des pubs pour lessives).
Compte-tenu de ces objectifs profondéments divergents (voire oppos%
Rédigé par : Antoine Block | 14 mars 2005 à 10:56
Je trouve ça un peu facile en 2005 de parodier la Cène (est-ce que ça n'a pas déjà été fait 10 000 fois ?), et dans le cas présent le "scandale" me paraît absolument calculé (l'homme nu ici ne sert à rien d'autre que de garantir la polémique), comme à l'époque de Toscani-Benetton où polémiques et débats étaient partie intégrante de la stratégie de visibilité de la marque.
Ceci dit, ce genre d'interdiction est toujours une très mauvais nouvelle, et la preuve qu'on s'achemine vers une société de plus en plus restrictive, où les "communautés" (religieuses ou non)attaquent en justice pour un oui ou pour un non. La liberté d'expression a vraiment du plomb dans l'aile...
Rédigé par : Damien | 14 mars 2005 à 11:38
Damien : facile, oui, mais ici relativement bien fait, puisque pas du tout, à mon avis, dans la provoc à deux balles à la Toscani, mais dans un traitement assez fin et délicat.
Antoine Block : je ne partage pas ce point de vue. Les frontières entre "marchand" et "culturel" ne sont pas aussi simple, et la publicité, dans les domaines de la mode, ne joue pas du tout le même rôle que dans la grande conso. Je doute que l'objectif unique et direct de cette publicité soit de faire vendre les fringues des créateurs.
Media : bien sûr, un monde sans pub, ce serait super. Un monde sans argent aussi. Et un monde sans hommes, sans doute aussi, ça serait plus reposant. Mais je ne goûte pas de l'utopie, je me place dans le réel, et ne suis pas un anti-pub idéologique.
Rédigé par : versac | 14 mars 2005 à 11:52
Toscani a quand même fait quelques coups intéressants ; j'aimais bien le chaste baiser entre un jeune prêtre et une bonne soeur en cornette : l'image était audacieuse et assez charmante, et pour le coup inédite. L'image de la Cène ici est esthétiquement réussie, mais vidée de toute signification.
Rédigé par : Damien | 14 mars 2005 à 15:29
personnellement, je suis assez d'accord avec l'analyse de Dominique Autié pour qui cette publicité est vide de sens. Où plutôt, non, elle n'est pas vide de sens (puisqu'elle en véhicule quand même, tu l'analyses aussi très bien Versac), elle vide la scène et le tableau d'origine de son sens. Au fond, c'est peut-être cela qui a tant choqué les évèques : il ne s'agit même pas d'un blasphème (puisque le blasphème prend grosso modo le contrepied du sens premier : c'est une posture qui fait exister "l'ennemi" pleinement), mais vraiment de prendre une image et d'en utiliser juste les lignes et les formes (ce qui est une véritable dévaluation de la croyance, paradoxalement plus choquante que s'il s'agissait d'un blasphème ou d'une réelle provocation)...
personnellement, je ne trouve pas ça choquant (le serais-je si j'étais catholique?), je trouve ça surtout très bête (et au fond assez moche), complètement creux et politiquement assez nul (car alors il aurait mieux valu que la publicité soit vraiment provoquante pour dépasser son statut de simple vecteur de communication - car une belle photos et des jolis mannequins n'auront jamais valeur d'art il me semble, du moins cela ne suffit pas)...
Cela dit l'interdiction n'est jamais une solution, surtout que je ne vois pas comment elle peut tenir juridiquement, vraiment je ne comprends pas. L'église catholique (de France) s'est encore ridiculisée même si je peux comprendre qu'on s'inquiète par l'affadissement des signes religieux quand on l'est, religieux. De là à attaquer en justice, c'est vraiment le signe d'une crispation, voire d'un état d'agonie...
(mais il est vrai que je ne suis pas le mieux placé pour critiquer tout ça...)
Rédigé par : jean-sébastien | 14 mars 2005 à 16:05
Je suis d'accord avec le vide de sens de l'image. C'est plus un clin d'oeil, un cliché, un moment de plaisir, en aucun cas une critique, ou une provoc. C'est gratuit. Mais ça remplit son rôle : interpeller, livrer des interrogations, et donner à la marque un parti-pris esthétique. Je n'ai pas vu de discours autour du concept publicitaire derrière, ce que voulait dire la marque (est-ce "la Cène aurait été belle si les apôtres avaient été habillés en MFG ?" ou "Et les femmes bordel ?" ou "MFG est au coeur de l'actualité, in ze move" ?). On ne le saura pas.
Il y a une tendance naturelle de la pub à exploiter des codes connus, communs à une culture, pour créer des repères d'appartenance. C'était le cas d'une autre campagne, totalement bidon, de Leclerc récemment avec les signes de Mai68. j'avais préparé un post sur le sujet, je vais essayer de creuser les différences entre ces deux cas.
Rédigé par : versac | 14 mars 2005 à 16:57
Plutôt que le critère "mobiles de l'auteur", mercantile d'un côté, vrai art de l'autre, le premier vil et glebé, le second noble et immaculé, distinction difficile à opérer en pratique, je pense que le critère pertinent est "peut être vu involontairement sur la voie publique, en 4x3 voire plus ; ou n'est exposé que dans un musée, un livre ou une revue qu'il faut acheter ou que l'on consulte en connaissance de cause".
Dans un cas, un catholique hypersensible sera choqué et blessé en se promenant avenue Charles de Gaulle à Neuilly, sauf à baisser le nez par terre en permanence, dans l'autre, il sera tranquille, sauf à aller à la Fnac feuilleter le dernier Bettina Rheims et dans ce cas c'est bien fait pour ses pieds.
Rédigé par : Eolas | 14 mars 2005 à 17:01
"Sans pub" me paraît bien plus réaliste que "Sans argent" :-)
Ne demandons pas l'impossible.
Pas tout de suite du moins.
Personnellement je me sens agressé, dès qu'une publicité tombe sous mon regard, quelqu'elle soit. Ou plus exactement, dès qu'une publicité m'agresse.
Cela dit cette affiche est très belle, et je la verrai bien dans un musée de la publicité, là où devraient être relégué toutes les pubs.
Rédigé par : Media | 14 mars 2005 à 21:55
Versac : "Je doute que l'objectif unique et direct de cette publicité soit de faire vendre les fringues des créateurs."
Vraiment ? Savez-vous combien coûte une publicité de cette ampleur, entre la conception, la prise de vue et la mise en scène, les mannequins, la réalisation technique, les retouches informatiques, la fabrication, la diffusion, la location d'espaces, etc. ? Cela se chiffre au total en centaines de milliers d'euros.
Alors, pour quelle mystérieuse raison une entreprise commerciale (qu'elle vende de la lessive, des bagnoles, des fringues ou quoi que ce soit d'autre) consentirait-elle un tel INVESTISSEMENT si ce n'était dans l'espoir d'en tirer bénéfice ?
Croyez-vous plutôt qu'il s'agit d'un engagement citoyen et altruiste pour stimuler la réflexion philosophico-théologico-esthétique de la France d'en bas ?
J'ajoute que je suis d'accord avec Eolas, sur la question de la diffusion et du choix laissé ou non au spectateur.
Rédigé par : Antoine Block | 15 mars 2005 à 02:30
Evidemment, toute entreprise cherche à réaliser des profits.
Mais le rôle d'une publicité n'est pas nécessairement de faire vendre directement, comme une promo, et il est faux de dire que les managers ont tous l'oeil rivé sur la courbe des ventes. Particulièrement dans le secteur de la mode, d'ailleurs.
Par ailleurs, je ne vois ce que celà a de conamnable. Le mobile, comme dirait Eolas, est de fabriquer et vendre des vêtements. Est-ce un péché ?
Par ailleurs, où se situe exactement la frontière entre la culture et le business ?
Pourquoi, sous prétexte qu'elles font des profits, cantonner les entreprises dans la vente de produits sans âme, leur interdire toute expression ? Je ne crois pas un instant à cette séparation. Je crois au contraire que la distinction profit/nonprofit va tomber à terme.
Je suis par ailleurs d'accord avec Eolas, aussi, avec le non choix laissé au spectateur dans le media affichage. Ce n'est pas la pub qu'il faut condamner, mais son excès quand il ne peut être zappé.
Rédigé par : versac | 15 mars 2005 à 09:52
Pour ma part, cette interdiction me navre et m'inquiète.
Elle me navre car je trouve l'image belle et il est dommage de censurer ce qui est beau !
Plus sérieusement, elle m'inquiète parce qu'elle place des croyances intimes, qui n'émanent que de soi, au-dessus de droits collectifs, telle la liberté d'expression, qui sont acceptés par tous et pour tous.
Enfin, ne remet-elle pas en cause le principe de laïcité en faisant primer une vérité sur toutes les autres :
http://sebparis.over-blog.com/article-188098.html
Rédigé par : sébastien | 16 mars 2005 à 14:29
Certaines publicités sont effectivement plus subtiles que la réclame d'antan et plutôt que de vanter grossièrement les mérites du produit, elles visent à tisser une atmosphère séduisante, à rendre la marque synonyme de valeurs désirables (coolitude, liberté, branchitude, intelligence, voire culture, etc.). Il n'empêche que ce type de stratégie (car c'en sont) a pour fonction ultime et unique de vendre quelque chose.
Il n'y a rien de mal à ça. Ce qui est gênant, c'est justement le discours qui tend à le nier pour mieux le réaliser. La manipulation mentale (l'expression vous choquera sans doute mais s'agit-il pourtant d'autre chose ?) ne fonctionne jamais si bien que lorsqu'elle est ignorée du sujet. Faire passer cela pour un jeu bien innocent, du loisir, du "fun", bref insister sur l'innocuité, c'est le meilleur moyen de faire tomber les défenses de la "cible" (puisque c'est ainsi que les publicitaires désignent les consommateurs). Et dès lors, on entre bien dans une pratique manipulatrice et donc — au moins potentiellement — un rapport à l'Autre de type utilitariste.
La distinction entre culture et économie ne se réduit donc pas essentiellement à l'opposition entre profit et non-profit. Ceci n'est qu'une distinction de surface qui a davantage valeur de symptôme que de définition ontologique. Il est vrai que les productions artistiques ne sont pas du tout exemptes d'enjeux économiques (prix des œuvres, marché de l'art, système des commandes dans le passé ou aujourd'hui, coûts de fabrication, etc.). La différence profonde, de nature, se situe entre un système performant et "mobilisé" (au sens où il obéit à un mobile unique) et, d'autre part, un ensemble d'activités qui ne se définit précisément que comme anti-système (l'impossibilité de définir "l'art" de façon satisfaisante), que comme négation en acte de l'esprit de système. En clair, la publicité est assignée à une fonction (qui se trouve être de nature économique, mais là n'est pas l'essentiel), lorsque l'art sape jusqu'à l'idée même de fonctionnalité et d'utilitarisme. C'est ce qui reste un ébranlement extrêmement profond et dérangeant pour une société dont les bases reposent sur les notions de pragmatisme, performance, exploitation, etc. (nos conceptions de l'agriculture, de la science, de la politique, de la colonistaion et/ou l'intégration du différent reposent sur ces modes d'appropriation).
Donc, même si ce n'est évidemment pas "un péché" de chercher à faire du profit, cela ne constitue pas non plus un but sacré devant lequel toute objection serait tenue pour sacrilège, et toute réserve pour hérétique.
Rédigé par : Antoine Block | 16 mars 2005 à 23:33
Certaines publicités sont effectivement plus subtiles que la réclame d'antan et plutôt que de vanter grossièrement les mérites du produit, elles visent à tisser une atmosphère séduisante, à rendre la marque synonyme de valeurs désirables (coolitude, liberté, branchitude, intelligence, voire culture, etc.). Il n'empêche que ce type de stratégie (car c'en sont) a pour fonction ultime et unique de vendre quelque chose.
Il n'y a rien de mal à ça. Ce qui est gênant, c'est justement le discours qui tend à le nier pour mieux le réaliser. La manipulation mentale (l'expression vous choquera sans doute mais s'agit-il pourtant d'autre chose ?) ne fonctionne jamais si bien que lorsqu'elle est ignorée du sujet. Faire passer cela pour un jeu bien innocent, du loisir, du "fun", bref insister sur l'innocuité, c'est le meilleur moyen de faire tomber les défenses de la "cible" (puisque c'est ainsi que les publicitaires désignent les consommateurs). Et dès lors, on entre bien dans une pratique manipulatrice et donc — au moins potentiellement — un rapport à l'Autre de type utilitariste.
La distinction entre culture et économie ne se réduit donc pas essentiellement à l'opposition entre profit et non-profit. Ceci n'est qu'une distinction de surface qui a davantage valeur de symptôme que de définition ontologique. Il est vrai que les productions artistiques ne sont pas du tout exemptes d'enjeux économiques (prix des œuvres, marché de l'art, système des commandes dans le passé ou aujourd'hui, coûts de fabrication, etc.). La différence profonde, de nature, se situe entre un système performant et "mobilisé" (au sen
Rédigé par : Antoine Block | 16 mars 2005 à 23:38
http://www.metropoleparis.com/2003/817/post4817.jpg
Et cette pub pour le café San Marco...pourquoi n'est elle pas génante? On a pourtant tous les ingrédients pour qu'elle déplaise au meme titre que l'utilisation du tableau de la Cène. Nous avons une peinture de Michel Ange, notamment le plafond de la chapelle sixtine " la création de l'homme", oups mais c'est aussi un sujet biblique...pour du café!!!!!!! diantre, et ça ne fait bouger personne...comprends pas.
Rédigé par : marie | 19 juin 2005 à 13:33
It reminds me Kate Moss in priest style by Bettina Rheims. I forward to my friend Caroline-Christa Bernard.
Rédigé par : Antonin W | 02 août 2008 à 01:08