De l'importance des rêves.
Depuis que j'avais 4 ans, je me racontais que quand plus rien n'irait, j'irais habiter dans la Cordillière des Andes, au milieu des lamas et des hommes et des femmes à la peau brune et souple et sèche, qui portent sur la tête des bonnets bigarés.
A 20 ans, la solitude sur le campus d'HEC, mon mec me largue pour la 4ème fois, je me sens chavirer à chaque pas, et voilà qu'en marchant dans le couloir des études, près du bureau des stages, j'aperçois un encart de 10 cm sur 5, "Les amis du Chilis recherchent des volontaires".
C'était l'annonce, c'était le moment pour moi de réaliser ce rêve-là, mon rêve vieux de 16 ans.
Je ne parlais pas espagnol, j'avais l'air encore plus jeune que mes 20 ans, j'ai dû convaincre tout le monde et attendre 18 mois avant de mettre mon projet à exécution, mais vous le savez, je l'ai eu mon Chili.
Et je porte toujours aujourd'hui mes bonnets à oreilles tombantes, tricotés en poil de lama.
A San Bernardo, la ville de banlieue de Santiago où j'ai atteri, les volontaires dont je faisais partie étaient encadrées d'assez loin par une communauté de religieuses salésiennes. Leur mère supérieure était une très belle et fine française à qui je ne parvenais pas à donner un âge, la Madre Aliette. Ce que j'aimais avec "mes salésiennes", c'est qu'elles connaissaient bien les familles, elles prenaient les femmes et les enfants dans les bras, elles n'avaient pas du tout cette aura désincarnée et distante des religieuses que je connais en France.
J'ai discuté plusieurs fois avec Madre Aliette, qui m'a enrolée dans un groupe de prière charismatique (j'ai adoré prier en dansant !), me grondait quand je portais des jupes trop courtes... Je me questionnais beaucoup sur ma vocation (comme aujourd'hui, finalement : à quoi suis-je appelée ?) et devant la beauté de leur vie missionnaire, j'ai bien sûr pensé à me faire religieuse. Mais un point me travaillait (enfin deux, mais je ne lui ai parlé que d'un seul) : comment vivre sans engendrer d'enfants ?
Sa réponse m'a stupéfaite, éclairée et m'éclaire toujours, 15 ans plus tard : il n'y a pas qu'une seule façon d'être féconde, mais une infinité.
Oui, quand je me languis d'un nouveau bébé dans mon ventre, je peux aller jardiner, prendre soin de mes enfants existants, vivre mes grossesses imaginaires (ce week end d'aileurs, j'ai été enceinte de jumeaux, petit A et petit B, le temps d'une superbe impro clownesque), faire du pain, m'occuper des enfants des autres (vendredi j'ai traduit la Mélodie du bonheur à une petite voisine de ma mère, j'ai adoré !), accoucher de mes enfants créatifs (ce blog.. mon livre...), travailler en pouponnière, pourquoi pas ?
Et relire mes merveilleux livres Goddesses in every women, ou Femmes et déesses tout simplement, qui me racontent comment prendre soin de chaque partie de moi.
Bon cheminement à nous toutes qui aimerions nous sentir plus fécondes... Et qui avons ce pouvoir, de faire de nos vies une successions d'Avents, de délivrances, de périodes de sécheresse, et de fécondation de nouveau.

A propos de notre autre discussion de vendredi, voilà cette photo d'un dimanche de septembre, où je me sentais belle, en fait c'est parce que je me sentais belle que j'ai demandé à Nicolas "prends moi en photo !" Et j'aime le résultat. Merci mon Nico.
Laurent.. il est là à présent.
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