Je me souviens de Maxime, la femme de Marcel et la maîtresse du setter Wahoucla, qui nous a accueillis plusieurs étés dans son chalet au bord du lac d'Annecy. Son visage était profondément marqué de rides d'amour, je l'appelais Ma gentille sorcière sans qu'elle s'en formalise.
Je me souviens de la chevelure rousse de Valérie qui était venue animer un atelier à HEC au féminin sur l'assertivité au féminin, son style élégant et juste, sa voix qui portait bien, tout en elle m'a plu et son discours, je ne l'avais jamais entendu avant, au point qu'après l'atelier je suis allée la voir pour lui dire Vous devriez écrire un livre !
Je me souviens d'Isabelle et de ses cheveux courts. Trois semaines après la fin de notre séjour linguistique à Darmstadt, elle m'avait envoyé une cassette audio. Je me souviens de sa voix grave emplissant ma chambre, qui disait qu'elle rêvait de moi nue, et désirait caresser mon corps.
Je me souviens de Corinne et de Christine, les deux sylphides de 3ème que je trouvais si gracieuses et si belles dans la cour du collège. Au gala de danse de l'AS, elles ont monté à deux une choré sur une chanson de Nina Hagen dont je peux encore fredonner l'air.
Je me souviens de Thérèse, de son humour et de sa cosmogonie, de sa manière chaleureuse de nous embrasser quand elle nous accueille, trois qualités que la maladie d'Alzheimer n'a pas altérées.
Je me souviens de Laure, de la manière dont sa peau a rosi et sa silhouette s'est élancée le jour où elle a décidé de participer au Raid des Amazones.
Je me souviens d'Andrée que ma grand-mère trouvait insupportable, moi je la trouvais belle et adorais discuter avec elle. Un jour elle m'a montré fièrement une photo d'elle à vingt ans, je crois l'avoir déçue en secouant la tête, "Je vous préfère aujourd'hui".
Je me souviens d'Alix et de ses yeux perçants derrière ses lunettes, Alix et sa voix pointue, Alix qui accueille tous les perdus du monde dans son appart bourré de tapis, Alix et sa cuisine parfumée, Alix la cabossée à la peau fine et robuste.
Je me souviens de Chimène, j'étais persuadée que ce serait un garçon ! Elle était tellement petite et tellement déterminée à tout regarder, à prendre son espace.
Ce texte est né cette nuit, dans mes pages du matin, à la suite de la lecture du titre du texte de Marc Winckler Je me souviens de ces femmes. J'ai lu le texte après.
Après le texte Je me souviens de Georges Perec, il y a ces mots : "A la demande de l'auteur, l'éditeur a laissé à la suite de cet ouvrage quelques pages blanches sur lesquelles le lecteur pourra noter les "Je me souviens"que la lecture de ceux-ci aura, espérons-le, suscités."
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