Les morceaux de ville explorés maintes et maintes fois - en se promenant avec le chien, en allant chez la nounou, puis à l'école, chercher le pain, faire un tour quand on est en colère. Nos yeux reconnaissent chaque arbre, chaque porte, l'éclat exact des réverbères à la nuit tombée ; nos oreilles ne s'étonnent plus aux klaxons des bus ou des camions, elles savent qu'à 8 heure chaque matin de semaine la sonnerie du collège voisin va retentir et se réjouissent du rappel de la cloche de l'église. Nos pas savent par coeur où il faut s'arrêter avant de traverser telle rue, telle autre (chaque rue se traverse d'une manière particulière). Nos pieds connaissent les raignures de chaque trottoir, l'endroit où il devient pavé, l'endroit où une racine a poussé le bitume.
Ce quartier, c'est chez nous, c'est nous - jusqu'au jour où on déménage et alors, à peine les cartons posés dans un autre lieu, c'est l'exil. On a émigré, on n'appartient plus. Et parfois quand on revient en pélérinage, souvent au début puis de moins en moins, des souvenirs viennent nous picoter le coeur, C'était moi cela, je vivais ici, je faisais partie de cette vie-là qui aujourd'hui se déroule sans moi.
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